top of page
  • Photo du rédacteurAdèle Aribaud

Colliers : le tout premier rang

S’il est d’usage de concevoir des colliers massifs dont le point d’orgue est le pendentif central, force est de constater que le design d’un bijou ne dépend pas que de lui. Et ce n’est rien de le dire. Bien plus discrète, la « ligne » intérieure du collier, le premier rang proche du cou, revêt une importance plus capitale encore. Géométrique, mousseux, cranté ou ondulé : quand tout le design repose sur un fil.

Premier exemple de premier rang déterminant pour un collier, celui du mariage de La Princesse Grace de Monaco. Choisi sur les conseils de Louis Arpels lui-même, le collier est composé de trois rangées de perles de culture. Deux bagues endiamantées les enserrent, accentuant incidemment la tension subie par le rang le plus court, le premier. Ainsi complexifié, le classique collier de perles se modernise en perdant de sa forme circulaire. Hyper raffiné.



Les colliers rigides de Chaumet et Chanel : eux sont des modèles plus sophistiqués. Ils n’ont pas de « rang » intérieur mais une seule et même ligne, esthétique autant que structurelle. Autrefois signe de servitude, ce type de collier « dur » est aujourd’hui conçu pour être confortable et aérée : leur ligne principale subit une césure sur le devant. Alors, les deux extrémités du bijou arrivent de part et d’autre du cou, se font face, et… s’évitent poliment. C’est la relation qui les lie -ou les oppose- qui dessine le bijou. De surcroît, si le collier torque Gingko de Chaumet (1977) est de forme tubulaire sur tout son long, le Comète de Chanel (1932) est un collier « plat » de quelques centimètres de large. De fait pour être bien positionné et paraître souple, il subit, comme le ferait un ruban fin, une torsion à l’endroit de la nuque.


Notons que le design d’un collier ne repose pas forcément sur le bas de la pièce, il peut aussi être diffus et de surcroît, modulable. Ainsi c’est au collier Zip de Van Cleef et Arpels que l’on pense sans hésiter, la plus précieuse des fermetures éclair. Près du cou s’alignent des dizaines de petits crans. D’or ou de platine, lesdits « crans » ont nécessité plusieurs décennies d’élaboration et permettent à la tirette de monter ou descendre à l'envi. Avec Zip, le premier rang abrite donc le concept du bijou, les éléments matériels qui ont permis de le mettre en forme, le mécanisme de sa transformabilité et bien évidemment, tout le génie des joailliers de la Maison.


Aussi quand le bijou est dépourvu de concept technique particulier, en a-t-il un esthétique. C’est le cas du Pavés de cristal de Boucheron, un autre bijou transformable dont on peut détacher le pendentif en diamant. Grâce au blanc nuageux du cristal de roche, la mosaïque donne l’impression d’un bijou vaporeux comme une nébuleuse. Si le pendentif en diamant est retiré, le point de chute du regard change. C'est le parallélisme des arrêtes rectilignes de la trame intérieure avec les pavés blancs qui attirent l’œil. Ainsi le collier devient si géométrique que même les cubes de cristal de roche semblent mieux ordonnés.


Enfin, concluons avec le collier franges d’or/diamants de Pierre Sterlé (1955). À l’instar des perles de Grace de Monaco, sa ligne est « cassée » par deux arabesques dont les ondulations permettent au premier rang de s’affaisser d’un centimètre en toute discrétion. Il n’y a donc pas un, mais deux « premiers rangs ». Le principal passe derrière la nuque et se termine aux arabesques : il sert de base et de repère. Le second, court et visible au-devant, se met au service de l’effet d’optique et concrétise la supercherie. Le « double premier rang », associé à la découpe des franges d’or, créé un effet aussi léger qu’efficace.



Pour aller plus loin :



  • Collier luxuriant, montant au cou à la façon d'un col élisabéthain : le collier Nuage de fleurs, Boucheron, 2018. Collection Nature Triomphante.  260 pétales de nacre, tourmaline de 42,96 carats.


 

Bennett, D., & Mascetti, D. (2012). Célébration du bijou, bijoux exceptionnels des XIX et XX siècles. (C. Pierre-Bon, Trad.). Woodbridge, United Kingdom, Edition La bibliothèque des arts.


Chahine, V. pour Le Goût de M - Le Monde (28 novembre 2016). Les diamants de Coco. Consulté à l'adresse : https://www.lemonde.fr/m-horlogerie-joaillerie-le-gout-de-m/article/2016/11/28/les-diamants-de-coco_5039625_4497512.html


Hoffmann, D. (2011). La Haute joaillerie, le luxe à la française. Paris, France, Editions de la Martinière.


Lenfant, J. (1979). Bijouterie - joaillerie, encyclopédie contemporaine des métiers d’art. Paris, France, Editions du Chêne.


Mauriès, P. (1993). Les bijoux de Chanel (Beaux livres éd.). Paris, France, Editions Thames & Hudson.


Possémé, E. (2012). Van Cleef & Arpels - L’art de la haute-joaillerie. Paris, France. Editions Les Arts Décoratifs.

  • Instagram - Gris Cercle
bottom of page