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  • Photo du rédacteurAdèle Aribaud

Le storytelling joaillier s’inspire de la Renaissance

Ils grimpent, se déplacent, accèdent à des endroits où on ne les imagine pas. Les publicités les présentent sous un jour plus moderne. « Ils » ce sont les bijoux des grandes Maisons, des créations exceptionnelles qu’on voit de plus en plus s’affranchir des usages que leur histoire prestigieuse leur a imposée. Entendue comme une forme d’émancipation symbolique, force est de constater que la tendance est en fait plus ancienne que ce qu’elle paraît. D’Elisabeth 1ère à la Place Vendôme, il n’y a qu’un pas !


Outre les nouveaux bijoux de lèvres, de mains ou d’ongles qu’on voit fleurir çà et là, il reste les bijoux classiques, ceux dont la définition n’a pas évolué depuis la période étrusque : colliers, bagues, bracelets et plus tard, les broches. Si les créateurs n’ont de cesse de réinventer leur apparence, ces artefacts eux, n’ont pas changé depuis 2000 ans. Un collier est un collier, en somme.

C’est là que la Renaissance entre en scène. Pas seule d'ailleurs. Le préraphaélisme, le néoclassicisme, le baroque et le romantisme l'accompagnent également jusqu'au coeur du marketing des grandes Maisons. C’est le point culminant de l'exposition « Autrement » montée par Chaumet en 2019. Elle présentait les photographies de la française Julia Hetta, dont les modèles posent avec des bijoux « portés décalés ». Par son biais, Chaumet développe un chapelet de nouveaux usages pour des bijoux traditionnels. Oui, un collier peut être plus qu’un collier. Sous son objectif, il habille une tresse. Comme des broches et boucles d’oreilles d’ailleurs, qui se réfugient maintenant au cœur des chignons et hautes coiffures. Les bracelets aussi grimpent pour se positionner en armille.


Et là les inspirations des grands maîtres de la peinture ancienne sautent aux yeux.

Des reproductions de toiles historiques sont accrochées aux murs de la salle pour rendre évident leur dialogue, et celles qui n’y sont pas semblent y être quand même. La Belle Ferronière et son front ciblé par notre œil, les perruques chargées de Marie-Antoinette, les boucles rousses et emperlées d’Elisabeth 1ère. Les photos de Julia Hetta elles, ont pour écrins quelques vingt-cinq somptueux cadres prêtés par la Maison Lebrun, un historique marchand de cadres qui compte parmi ses clients les musées les plus prestigieux du monde.


D'autres grandes figures inspirent aussi la tendance. Entre autres l’Impératrice Élisabeth Wittelsbach d’Autriche, Sissi, couronnée par une cascade de broches en forme d'étoiles sur le portrait d'elle que peint F.X Winterhalter. Autre tête couronnée et non des moindres, sa nièce et filleule, une autre Élisabeth de Bavière. Malgré son rang, elle développe un goût certain pour l'anticonformisme. Pas le moins du monde décrédibilisée par son humour décalé, la Reine des Belges s’autorise à porter son diadème à l’envers pendant des représentations officielles. Précurseuse ou loufoque ?


Photographie d’Élisabeth, duchesse en Bavière et Reine de Belgique portant son diadème à l'envers (1876-1965), Anonyme.
Photographie d’Élisabeth, duchesse en Bavière et Reine de Belgique (1876-1965), Anonyme.

Après une telle légitimation du "porté-décalé", on n'est donc pas surpris de voir des campagnes publicitaires où nous sont présentées des broches-barrettes et de longs sautoirs tournés dans le dos ou enroulés autour des chevilles. Les bijoux sont gadgétisés -dans le bon sens du terme- et on constate que ça facilite le retour des broches, déjà en excellente voie sauf pour les pièces les plus volumineuses. Voyez ici la mise en scène géniale de la broche "Au Gré du Vent" dans la collection Contemplation de Boucheron. En ce qui concerne les autres bijoux, l’histoire de l’art est simplement pour eux une excellente source d'inspiration, illimitée et universelle.


 

Autrement. Exposition, Chaumet, 165 Boulevard Saint-Germain à Paris, du 1er octobre au 2 novembre 2019.


Ouvrage collectif (2018). L’art de la Renaissance. Paris, France, Editions Place des Victoires.

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